A la Sorbonne, une étudiante voilée est harcelée par sa professeur lors de sa rentrée

Une étudiante à La Sorbonne en Licence 3 de géographie a été victime d’une grave discrimination en raison de son voile à l’occasion de la rentrée.

Alors que la jeune femme se rendait à son premier jour de cours, mardi dernier, sa professeur l’a prise à partie en se lançant dans une tirade anti-voile de plusieurs minutes devant tous les élèves. Cette dernière estime entre autre que le voile nuit à la vie professionnelle et qu’il faut songer à le retirer lors des exposés. L’étudiante a été profondément humiliée par cet acharnement mais n’a pas souhaité se laisser faire.

Elle a rédigé une lettre relatant les faits et a obtenu la signature de plusieurs élèves attestant du déroulement de ce premier cours. Elle a ensuite déposé le courrier dans le bureau du directeur de l’UFR le lendemain soit le mercredi après-midi. Nous partageons en fin d’article le document.

Le jeudi, elle a été appelée par le directeur qui l’a informée avoir pris connaissance de la lettre et lui a demandé si elle couvrait uniquement ses cheveux ou si elle dissimulait également son visage. La jeune femme a répondu que seuls les cheveux sont couverts. Il a organisé un rendez-vous séparément avec chacun des protagonistes, à savoir la jeune femme voilée, sa professeur et les quatre étudiants ayant confirmé les propos. L’entretien a été fixé au lundi 22 septembre, c’est-à-dire demain.

Il a estimé que ce comportement de la part d’un personnel du corps enseignant est grave et interdit.

L’étudiante victime d’allégations islamophobes sévères souhaite porter plainte car elle juge cette attitude préjudiciable à sa personne et à ses études.

Cette sœur est un exemple du fait de sa détermination et de sa force. Le voile est totalement autorisé dans les facultés françaises. Bien que la professeur sache que la loi permet cette tenue, elle a tout de même considéré que l’élève n’avait pas à le porter. Cependant, nul n’est au dessus des lois et en tant que professeur, elle n’a pas à donner son avis sur le style vestimentaire de ses élèves. La jeune femme est une élève sérieuse et studieuse. Ce sont ses qualités intellectuelles qui doivent entrer en jeu et non ses choix religieux.

Il faut que cette femme soit sanctionnée de manière intransigeante afin de démontrer que la Sorbonne ne tolère pas une prise de parole inconsidérée et islamophobe. C’est par ce type de discours que l’islamophobie gagne du terrain. Chacun d’entre nous, à l’instar de Chifa, doit se dresser contre ces injustices anti-musulmans.

Lettre remise au directeur de l’UFR :

Paris, le 18 septembre 2014
Objet: Rapport d’un grave incident
Monsieur,

Je dois vous rapporter un grave incident discriminatoire dont j’ai été victime ce matin, mardi 16 septembre 2014.

Le cours débute à 8h30 à l’institut de Géographie. Madame V***, enseignante en hydrosystème arrive avec 10 minutes en retard. L’enseignante et les élèves s’installent en classe. Je suis assise au deuxième rang face à son bureau. Elle commence l’appel. Arrive mon tour, j’entends « G*** », je lève la main et regarde le professeur. Elle me regarde fixement et dit « euh, vous comptez garder votre truc à tous mes cours? ». Il faut ici comprendre que « ce truc » fait allusion au voile que je porte. D’abord étonnée de la question et du ton, je réponds poliment par l’affirmative. Elle ajoute « parce que cela me dérange et va gêner car il y a des exposés et faudra au moins l’enlever durant ces exposés, je suis là pour vous aider à l’insertion professionnelle et cela vous posera des problèmes » , et continue en expliquant qu’elle sait que c’est autorisé et que si ça ne tenait qu’à elle ça aurait été différent et continue par « C’est pas contre vous, les garçons aussi je leur dis d’enlever leur couvre-chef, leur casquette, c’est pour vous que je le dis « .

Je ne dis rien, trop choquée, et elle continue « il faudrait le savoir, c’est tout de même dans la culture française ». Elle se tait et attend que je réponde à sa provocation. Je ne sais pas quoi dire après ces propos discriminatoires, après réflexion, je lui dis simplement « c’est mon droit ». Elle reprend : « eh bien il faudra, enfin je préfère dans ce cas que tu ailles dans un autre TD ». Elle me regarde encore mais je ne dis rien, que dire après ce déferlement de propos hostiles et scandaleux, à cet acharnement poussé  dès les 5 premières minutes du cours ?

Elle reprend enfin l’appel et la présentation du cours, puis parle des thèmes des exposés et assure que l’habillement compte dans la note lors de l’exposé, elle se tait, me regarde longuement et dit pour l’ensemble de la classe « vous ne venez pas en slip quoi ! ». Je ne comprends pas pourquoi elle insiste sur ce sujet plus de 5 minutes et prend quelques secondes pour dire que le contenant et le contenu de l’exposé sont compris dans la note bien évidemment. Puis elle en arrive à dire qu’il y a la possibilité de changer de contrôle continu à contrôle final, et me regarde à nouveau longuement (mais s’adresse à l’ensemble de la classe) et dit « la masse de travail est énorme, vous êtes sûr de vouloir rester en contrôle continu ? ». Un silence pesant de 5 secondes s’installe, elle me fixe encore puis dit « d’accord vous avez de toute façon encore une semaine pour choisir « .

Je quitte le cours en disant au revoir par politesse mais ….je pense voir directement notre directeur de l’UFR monsieur R***. Il n’est pas là donc je passe voir la secrétaire pour essayer de changer de groupe de TD, non seulement à la demande de madame V***, mais aussi parce que je ne veux pas rester dans ce cours après cette humiliation publique, cette atteinte à ma liberté individuelle et ce piétinement des règles de respect au sein de l’université.
La secrétaire essaye de me changer de groupe mais celui qui est possible est rempli, les autres ne me conviennent pas car j’ai déjà d’autres TD de ma licence 3 de géographie aménagement au même temps. Elle me propose d’écrire un mail à R*** alors en lui expliquant la situation. Je la remercie et sors. Je décide alors d’écrire les propos pour ne pas les oublier.
 
Je suis actuellement très affectée psychologiquement de ces faits que je vous relate et il est difficile pour moi d’entamer sereinement la suite de mes cours. Cette discrimination dont j’ai été victime est extérieure au système universitaire et aux lois qui le régissent. L’université est un endroit où l’égalité est omniprésente et où la réussite est intimement liée au mérite. Or, cet incident me fait comprendre que mon voile, qui est un signe religieux autorisé et admis dans les instances universitaires,  peut être préjudiciable dans le déroulement de mes études. Le port de signes religieux est une liberté individuelle immuable au sein de l’université.

Les faits relatés ci dessus ont été confirmés par plusieurs de mes camarades présents au TD. Je vous prie, Monsieur, de préserver l’anonymat de ces personnes qui n’ont pas hésité à me soutenir indignés face à un tel comportement.

Je vous prie, Monsieur, de me recevoir dans les plus brefs délais dans votre bureau pour pouvoir convenir d’une issue favorable et d’une réponse adéquate face à cet incident.

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